Lorsque la Syrie commence à voir la fin de son calvaire, ce qui de toute évidence aurait été impossible sans un soutien réel du peuple à son président, Emmanuel Macron déclare que Bachar est l’ennemi du peuple syrien[1], appelant ainsi à prolonger l’ingérence, l’incendie, le malheur et la mort parce que la guerre, c’est la paix.

Quand la robotisation douée d’intelligence artificielle fait planer l’ombre d’un séisme sur l’emploi et appelle une réflexion profonde et novatrice, Emmanuel Macron choisit les politiques ultra-conservatrices d’un autre âge en massacrant le code du travail sans aucune autre perspective que la précarité des salariés parce que la liberté, c’est l’esclavage.

A l’heure où la technologie rend possible la diversification des sources d’information permettant les débats contradictoires afin de mieux cerner les faits, Emmanuel Macron annonce des outils de censure contre les médias qui n’adopteraient pas la ligne éditoriale de ceux possédés par l’Etat ou subventionnés par lui parce que l’ignorance, c’est la force.

Et c’est justement par un média d’Etat que l’on apprend que la promesse par le candidat Macron d’un service militaire obligatoire et universel pour les 18-21 ans – peut-être la seule qui valait de voter pour lui au premier tour de la présidentielle – est abandonnée pour un parcours citoyen pour collégiens. Ce remplacement, aussi valide que celui d’une voiture par une cafetière, prévoit notamment une semaine en partenariat avec des associations caritatives. Pour ne pas souligner l’irresponsabilité de cette gouvernance, on n’évoquera pas ici l’absurdité du projet de trouver chaque année suffisamment de telles associations pour prendre en charge plus d’un demi-million d’adolescents pendant une semaine.

Ce qui est inquiétant dans cette décision, c’est qu’à l’expérience du réel par de jeunes adultes, on préfère un formatage théorique des enfants. Car plutôt que l’excellent projet de confronter des jeunes gens à la réalité en faisant cohabiter – en particulier dans des dortoirs et des cantines – des blancs des beaux quartiers et des immigrés coiffés d’une capuche, on fera réciter ad nauseam dans les collèges, là où n’existe aucune mixité, le catéchisme habituel du vivre-ensemble citoyen (à ce propos on peut  écouter ici un modèle de langue de bois débité par un archétype de jeune-vieux). Mais pour ne pas souligner l’amateurisme de cette gouvernance, on ne rappellera pas qu’un parcours citoyen existe déjà à l’école depuis juin 2016.

Ainsi, après avoir ingéré les formations civiques et morales républicaines, les ABC de l’égalité, les stages en entreprise, l’antiracisme, les EPI, les itinéraires de découverte, les accompagnements personnalisés, la sécurité routière, la lutte contre l’homophobie et la semaine du goût, l’école va se charger d’une nouvelle mission, donc se donner une nouvelle raison d’échapper à la sienne. Notre ministre de l’Education tient des discours très encourageants sur la promesse d’un retour du bon sens et de l’instruction, mais la catastrophique réforme du collège de son prédécesseur a été maintenue. Alors quand Emmanuel Macron tient pour moderne l’orientation prise par l’école il y a plus de quarante ans, orientation ayant mené au désastre que l’on sait, notre ministre pourra-t-il s’y opposer ?

C’est en 1949 que Georges Orwell écrivait son 1984 alors finalement, on ne voit plus très bien ce qu’il y a de jeune chez le président Macron à part son âge. Peut-être parce que dans sa vision du monde, le passé, c’est le futur.

Michel Segal 

Michel Segal est professeur de mathématiques. Auteur de trois essais sur l’école Autopsie de l’école républicaine (2008) – Violences scolaires, responsables et coupables (2010) – Collège unique, l’intelligence humiliée (2011). Et de Ukraine, histoires d’une guerre (2014) qui analyse la guerre qui déchire l’Ukraine en se fondant sur sa connaissance approfondie du contexte et des enjeux internationaux.

[1] Est-ce par fraternité que Macron fait référence au président syrien en l’appelant par son prénom ?

Source: https://arretsurinfo.ch/de-quels-temps-macron-est-il-le-nom/