Josep Borrell, chef de la politique étrangère de l’UE, en 2022. (Parlement européen, Flickr, CC BY 2.0)

La diplomatie est la conduite de négociations et de reconnaissances diplomatiques entre les personnes, les groupes ou les nations en vue de définir un accord, par exemple pour résoudre un conflit sans violence. À ce titre les relations internationales sont indissociables de la guerre, ou, plus exactement d’une tension constante entre la guerre et la paix.  Raymond Aron(1) a établi que les deux principaux acteurs des relations inter-étatiques sont l’ambassadeur et le soldat : l’un comme l’autre ont  pour fonction de représenter leur pays à l’étranger. Il existe ainsi une relation de continuité entre la diplomatie et la guerre. Toutes deux visent également à garantir les intérêts d’un pays donné : la première par la négociation, la seconde par la violence(2).

Ces définitions établissent clairement les rôles respectifs, du diplomate et du militaire, dans les relations inter-étatiques. Chacun contribue à protéger les intérêts fondamentaux d’une nation. Bien évidemment, la diplomatie est à privilégier, les moyens militaires constituant le dernier recours. Comme le disait fort justement le roi Frédéric II de Prusse : « l’agresseur c’est celui qui contraint son adversaire à recourir aux armes »(3).

La noblesse de la diplomatie est d’éviter les conflits, ou, lorsqu’un conflit a éclaté, d’essayer par tous les moyens de le stopper et de le résoudre par la négociation. Le diplomate et le militaire, sont les deux faces d’une même pièce. La seule arme du diplomate, c’est la parole, le verbe, le logos, c’est de négocier en usant de toutes les ressources oratoires à sa disposition.

Ici il faut évoquer le souvenir de Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord communément appelé Talleyrand, (2 février 1754 -17 mai 1838), qui fut un homme d’Église, un homme d’État et un diplomate français, actif du règne de Louis XVI à celui de Louis-Philippe, particulièrement pendant les périodes de la Révolution, de l’Empire et de la Restauration(4). Il fut sans doute le plus grand diplomate d’Europe, de France certainement. Chargé par Louis XVIII de défendre les intérêts de la France au congrès de Vienne en 1814, Talleyrand réussit à fissurer le mur des vainqueurs avides de dévorer leurs proies. « Ce miracle d’habileté, qui rendit à la France sa place parmi les grandes nations et sa voix dans le concert européen, c’est Talleyrand qui l’accomplit » écrit Jean Orieux(5).

Josep Borrel, qui se présente comme le chef de la diplomatie européenne, n’est certes pas à la hauteur de son illustre prédécesseur. Bien pire, il est son exact opposé. Là où Talleyrand mettait son verbe et son art au bénéfice de la paix, Borrel se présente comme un faucon, un va-t’en guerre, à mille lieux de l’image habituelle d’un diplomate. Depuis le début du conflit en Ukraine, Josep Borrel a délibérément revêtu le costume du guerrier, multipliant les déclarations incendiaires, indignes d’un diplomate et fort éloignées de la bienséance propre à la diplomatie.

Ainsi ce sont des propos peu diplomatiques qu’il a tenus lors de l’inauguration de la nouvelle Académie diplomatique européenne, à Bruges, le 13 octobre 2023. Des observations qui ont suscité un tollé médiatique et diplomatique à travers le monde. Tout a commencé par le discours, devant un parterre de futurs diplomates européens, du chef de la diplomatie de l’Union européenne. Josep Borrell y a détaillé ce qu’il considère être la place de l’Europe dans le monde.

« Oui, l’Europe est un jardin », a-t-il affirmé en préambule avant d’expliquer que les Européens ont « construit un jardin » où « tout fonctionne. » Mais le diplomate européen a ajouté, sur sa lancée : « La plus grande partie du reste du monde est une jungle, et la jungle pourrait envahir le jardin[…] »(6).

De tels propos, indignes d’un responsable politique européen, auraient dû provoquer une réaction unanime de protestation des futurs diplomates européens qui l’écoutaient. Leur auteur aurait dû-être sanctionné et démis de ses fonctions sur le champ. En ne condamnant pas ces propos , l’Occident a démontré, au reste du monde, qu’il n’a que  mépris  pour les autres nations. Elles sauront s’en souvenir…

Le 31 janvier 2024, la porte-parole de la diplomatie russe a estimé « monstrueuse » l’affirmation du chef de la diplomatie européenne selon laquelle les « tentations de conciliation » des Européens avec la Russie demeuraient « erronées ». « Depuis des siècles c’est la même chose: l’Occident cherche à semer la discorde, à empêcher les gens de se réconcilier, de vivre normalement », a déclaré, le 31 janvier, Maria Zakharova au micro de Sputnik(7). La porte-parole de la diplomatie russe réagissait aux propos de Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, dans une tribune publiée la veille dans l’Obs.

« On entend de nouveau dire que l’Ukraine ne peut pas gagner, que le soutien de l’Occident ne tiendra pas » et que «les tentations de conciliation refont surface», avait-il affirmé. Des « idées », qui selon lui, « étaient erronées en 2022, et elles le restent aujourd’hui ». «Qui peut sérieusement croire que Vladimir Poutine cherche un compromis ?» justifie Borrell qui appelle les Européens à changer de paradigme «et passer d’un soutien à l’Ukraine « aussi longtemps qu’il le faudra » à un engagement à faire « ce qu’il faudra » pour que l’Ukraine remporte la victoire».

«C’est une déclaration absolument monstrueuse», s’est indignée Maria Zakharova, estimant que les Occidentaux eux-mêmes seraient conscients que cette affirmation n’était «pas seulement marginale, elle est folle». Selon elle, cette seule pensée est « contradictoire avec l’essence du travail de diplomate ».

Faut-il s’en étonner venant d’un individu  qualifié de personnage sulfureux par les observateurs qui le connaissent, selon les termes du Courrier international?(8.) Un diplomate qui ne fait que lire le narratif obligé, répété par tous les dirigeants occidentaux.« Si Vladimir Poutine « gagne cette guerre et conquiert l’Ukraine et met en place un régime fantoche à Kiev, comme celui que nous voyons déjà au Belarus, cela ne s’arrêtera pas là », » a déclaré le chef de la diplomatie européenne ce jeudi 14 mars. » (9)

Josep Borrel est vraiment le pire diplomate qui soit, et il est probable qu’il soit méprisé par tous les diplomates professionnels. Il défigure ce noble métier. Après avoir brillé par sa passivité pendant 5 années pour la mise en œuvre des accords de Minsk, il encourage au contraire depuis le début du conflit la poursuite de la guerre contre la Russie, en violant ainsi tous les principes même de la diplomatie. Un « diplomate » qui appelle à la guerre à outrance pour vaincre la Russie, finira dans les oubliettes de l’histoire.

MARC Jean  – 16 mars 2024

(1)Raymond Claude Ferdinand Aron ( 1905-1983) est un philosophe, sociologue, politologue, historien et journaliste Raymond Aron

(2) Diplomatie — Wikipédia (wikipedia.org)

(3) L’agresseur est celui qui oblige ses adversaires à recourir aux armes 

(4) Maurice de Talleyrand-Périgord — Wikipédia (wikipedia.org)

(5) Orieux Jean, Talleyrand, p599

(6)“Racistes” : les propos de Josep Borrell sur la “jungle” mondiale font polémique 

(7)https://rtenfrance.tv/international/109183-zakharova-fustige-declaration-borrell-conciliation

(8)Josep Borrell, le pas très diplomatique chef de la diplomatie européenne

(9)Guerre en Ukraine: Josep Borrell prévient que les prochains mois seront « décisifs »

Source: https://arretsurinfo.ch/le-pire-des-diplomates/