Par Craig Murray
Paru sur le blog de l’auteur sous le titre Ukraine: Where to Find the Truth in Enormous Detail
Au milieu du blitz massif de propagande sur l’Ukraine, il y a un endroit où l’on peut trouver, en détails minutieux, la vérité sur ce qui se passe quotidiennement dans cette zone de guerre civile. Il s’agit des rapports quotidiens de la mission de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe est une magnifique organisation créée pour surveiller la mise en œuvre des accords sur les droits de l’homme et le contrôle des armes pendant la période de la Guerre froide. Elle compte la Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis parmi ses 57 membres, ainsi que tous les États de l’UE. Elle opère dans des zones de conflit depuis plus d’un demi-siècle.
« L’Organisation comprend 57 Etats participants qui couvrent la planète, englobant trois continents – l’Amérique du Nord, l’Europe et l’Asie – et plus d’un milliard de personnes. L’OSCE a 57 Etats participants d’Europe, d’Asie Centrale et d’Amérique du Nord. »
Plus de 40 États membres ont des observateurs de l’OSCE dans la Mission spéciale d’observation en Ukraine (acronyme MSO). Le chef de la mission est turc, et presque tous les membres ont une formation militaire ou diplomatique. Il y a 700 observateurs, et ils sont en Ukraine depuis 2014. Leur travail consiste à patrouiller des deux côtés de la zone de conflit de la guerre civile et à enregistrer les violations des accords de cessez-le-feu et de désescalade, en les portant à l’attention des autorités compétentes.
Leur travail est très complet et leurs rapports quotidiens détaillés sont publics. Ils constituent la ressource journalistique la plus fantastique pour savoir ce qui se passe réellement sur le terrain. C’est pourquoi les médias grand public occidentaux n’utilisent jamais cette ressource, car la vérité est à l’opposé du tableau qu’ils souhaitent brosser.
Par exemple, trois observateurs de l’OSCE se sont rendus sur le site de la fameuse attaque au missile « de la maternelle », afin de vérifier quel type de missile a été utilisé, d’où il venait, puis de comparer ces données avec le registre détaillé de l’OSCE sur les armes des deux camps dans la région et leurs mouvements quotidiens. C’est, littéralement, le travail quotidien de base de la mission. L’équipe d’observateurs experts de l’OSCE – dont deux provenaient de pays de l’Union européenne – s’est vue refuser par le gouvernement ukrainien l’accès à l’école maternelle à son arrivée pour déterminer de quel type de missile il s’agissait et d’où il provenait. Cela constitue une violation directe de l’accord de cessez-le-feu.
Pour ceux d’entre nous qui, dès le départ, considérions l’attaque de la maternelle comme de la pure propagande, il s’agit là d’une confirmation.
Ceci est extrait du rapport quotidien de l’OSCE en date du 18 février :
Dommages causés à une école maternelle en activité à Stanytsia Luhanska, région de Luhansk
Le 17 février, la Mission a suivi les informations faisant état de dommages causés à une école maternelle en activité dans la partie nord-ouest de Stanytsia Luhanska (contrôlée par le gouvernement, à 16 km au nord-est de Luhansk).
A environ 4,5 km au nord-ouest de la limite nord-ouest de la zone de désengagement près de Stanytsia Luhanska, au 22 de la rue Depovska, à environ 20 m au sud-ouest d’un bâtiment de deux étages abritant une école maternelle, la MSO a observé un cratère dans l’aire de jeu du jardin d’enfants, ainsi que des marques évaluées comme étant causées par des éclats d’obus sur la face intérieure d’un mur en béton entourant le bâtiment. Elle a également observé un trou (d’environ 1 m de diamètre) et une fenêtre brisée sur la façade nord-est du même bâtiment, ainsi que deux fenêtres brisées sur le mur nord-ouest du bâtiment (au rez-de-chaussée et au premier étage).
La MSO a estimé que les dégâts étaient récents mais n’a pas été en mesure de déterminer l’arme utilisée ou la direction du tir.
Le personnel du département des affaires de la jeunesse de l’administration civilo-militaire de Stanytsia Luhanska a indiqué à la Mission que 20 enfants se trouvaient dans le jardin d’enfants au moment de l’incident, mais n’a signalé aucun blessé.
La Mission n’a pu procéder à son évaluation qu’à une distance d’environ 50 m de la façade nord-est et d’environ 30 m de la façade sud-ouest du bâtiment endommagé, car l’agent des forces de l’ordre n’a pas autorisé la Mission à accéder au site, affirmant qu’une enquête était en cours.
Ce même rapport fait état de nombreuses violations de l’accord de cessez-le-feu par le gouvernement ukrainien, qui a déplacé des armes lourdes pour menacer les zones tenues par les séparatistes et a conservé des armes en dehors des installations de stockage convenues. Il fait également état du même type de violations de la part des rebelles séparatistes. Aucun de ces bilans n’a été enregistré par les mêmes médias occidentaux qui adorent donner des comptes rendus détaillés des mouvements de troupes en Russie. Voici un minuscule exemple parmi des centaines d’informations de l’OSCE, tiré du même rapport du 18 février que la visite de la maternelle :
La MSO a continué à surveiller le retrait des armes en application du Mémorandum et du paquet de mesures et de son addendum.
En violation des lignes de retrait, la Mission a observé un système de missiles sol-air dans une zone contrôlée par le gouvernement dans la région de Donetsk. Elle a également repéré 21 obusiers, cinq canons antichars (dont quatre probables) et un système probable de lance-roquettes multiples, dans deux zones d’entraînement situées dans des zones non contrôlées par le gouvernement de la région de Luhansk.
Au-delà des lignes de retrait mais en dehors des sites de stockage désignés, la MSO a vu dix obusiers tractés et deux systèmes de missiles sol-air dans des zones contrôlées par le gouvernement dans la région de Donetsk, dans deux complexes (dont un près d’une zone résidentielle). Elle a également repéré deux systèmes de missiles sol-air, 12 mortiers et 41 chars dans deux zones d’entraînement situées dans des zones non contrôlées par le gouvernement de la région de Luhansk. (Pour plus d’informations, voir les tableaux ci-dessous).
Indices de présence militaire et de type militaire dans la zone de sécurité
Dans les zones contrôlées par le gouvernement des régions de Donetsk et de Luhansk, la Mission a vu sept véhicules de combat blindés. Dans les zones résidentielles des régions de Donetsk et de Luhansk non contrôlées par le gouvernement, la Mission a vu un canon antiaérien et deux véhicules de combat blindés (dont un probable). (Pour plus d’informations, voir le tableau ci-dessous).
Au cours de la journée, la MSO a vu un minibus, trois minivans, deux voitures et dix hommes (âge inconnu) portant des vêtements de style militaire et des fusils d’assaut dans une zone résidentielle d’Oleksandrivka (non contrôlée par le gouvernement, à 20 km au sud-ouest de Donetsk). La Mission a également vu un convoi composé de quatre camions (trois de type Ural et un de type Kamaz) et de trois voitures transportant au moins sept hommes dans une zone résidentielle de Brianka (non contrôlée par le gouvernement, à 46 km au sud-ouest de Luhansk) en direction du nord-ouest. Plus tard dans la journée, la MSO a vu le même convoi à Alchevsk (non contrôlé par le gouvernement, 40 km à l’ouest de Luhansk).
Trois pays ont maintenant retiré leur personnel de la Mission spéciale d’observation en Ukraine de l’OSCE en prévision d’une guerre à venir – le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada. À mon avis, cela en dit long sur ceux qui prévoient réellement de déclencher une guerre. Fait extraordinaire, après avoir retiré leur personnel, ces puissances occidentales informent maintenant les médias que l’OSCE (qui a été pendant des décennies un outil clé de l’architecture de la sécurité occidentale) est une organisation biaisée.
Une fois de plus, le parallèle avec la guerre d’Irak est frappant pour ceux d’entre nous qui se souviennent que les États-Unis et le Royaume-Uni avaient minimisé les rapports de l’équipe d’inspection des armes de l’ONU, en faveur de propagande et de mensonges purs et simples afin de déclencher une guerre.
CraigMurray
Craig Murray, un proche collaborateur de Wikileaks, est diplomate, historien et militant des droits de l’homme. Il a été ambassadeur du Royaume-Uni en Ouzbékistan.
Source: blog de l’auteur