Par Elijah J. Magnier : @ejmalrai
Paru le 6 juin 2020 sur le site personnel d’Elijah J. Magnier
Le monde est en pleine tourmente. L’année 2020 a déjà apporté son lot de crises majeures. D’une part, l’affrontement USA-Iran à la suite de l’assassinat du major général Qassem Soleimani par les USA. D’autre part, la pandémie de COVID-19 et la catastrophe économique qu’elle entraîne, qui ont coûté la vie à environ 400 000 personnes dans le monde et fait perdre des dizaines de millions d’emplois. Rien de tout cela n’a cependant empêché les USA d’imposer encore plus de sanctions contre l’Iran, la Syrie et lu Venezuela. L’Iran, qui est déjà soumis à des sanctions maximales depuis 1979, a envoyé cinq pétroliers au Venezuela pour briser l’embargo sur les composantes et les pièces de rechange indispensables à la transformation du pétrole vénézuélien à faible taux d’octane. Pendant que les USA connaissent une implosion due aux protestations internes causées par un racisme et une injustice profondément enracinés, d’autres fronts au Moyen-Orient prennent corps dans l’ombre pour prévenir la guerre ou au contraire déclencher un affrontement militaire plus élargi.
Un de ces fronts est le Levant où des préparatifs sont en cours pour défier Israël et mettre fin à ses violations continuelles de la souveraineté syrienne et au bombardement de centaines de cibles en Syrie pendant toutes ces dernières années de guerre. Cet enjeu en particulier pourrait entraîner le Moyen-Orient dans une guerre totale. La moindre erreur pourrait s’avérer fatale et entraîner la région dans un affrontement généralisé qui n’impliquera pas seulement la Syrie.
Il est bien connu qu’Israël possède une puissance de feu énorme et des forces armées imposantes pour mener des combats terrestres, maritimes et aériens, en étant mieux équipé que toute autre armée au Moyen-Orient. On sait aussi que le principal ennemi et cauchemar d’Israël, le Hezbollah libanais, dispose d’armes perfectionnées, de drones armés et de missiles de croisière subsoniques tous temps à longue portée pour des attaques terrestres. Le Hezbollah possède également des missiles stratégiques antinavires à longue portée, des missiles antichars guidés laser, des missiles sol-air à basse et moyenne altitude et des missiles de précision. Ces derniers sont pointés vers des cibles précises sur tout le territoire palestinien contrôlé par Israël, y compris les ports, les aéroports, les casernes militaires, les infrastructures, les navires, les plateformes pétrolières et les hélicoptères ou avions volant à moyenne altitude. Al-Ridwan, les forces d’opérations spéciales du Hezbollah qui comptent des milliers de membres, n’a jamais perdu une bataille depuis son premier engagement en Syrie.
Israël n’a jamais cessé de se procurer le matériel militaire le plus moderne qui soit, mais n’a pas réussi à développer sa combativité. Il n’a pas acquis d’expérience militaire sur le champ de bataille dernièrement, la dernière bataille remontant à 2006, lors de la deuxième guerre contre le Liban (après la première invasion de 1982), qui a été un échec à bien des niveaux. Dans l’intervalle, l’ennemi d’Israël, le Hezbollah, a développé et renforcé sa combativité après avoir combattu pendant de nombreuses années consécutives dans un théâtre d’opérations militaires très étendu, estimé à presque 12 fois la superficie du Liban et 60 fois celle de la zone de combat contre Israël au sud du Liban et dans la vallée de la Bekaa.
Le Hezbollah a combattu aux côtés d’armées classiques (syrienne, russe et irakienne), ce qui lui a permis d’acquérir une expérience du champ de bataille contre des groupes armés formés et armés par la CIA et d’autres djihadistes affiliés à Al-Qaïda et à Daech qui possédaient une capacité au combat très développée (en plus de leurs compétences classiques en matière de guérilla) et une forte motivation spirituelle, beaucoup plus poussée que celle des soldats israéliens. Ces djihadistes ont combattu l’armée américaine tout au long de son occupation de l’Irak et ont fini par lutter contre les armées irakienne et syrienne et diverses organisations, ce qui leur a permis d’acquérir une grande expérience de combat et des tactiques de combat de guérilla avancées, en plus de leur insuffler une aspiration au martyre.
Cependant, leur défaite aux mains de la Syrie et de ses alliés russes et iraniens a anéanti les espoirs d’Israël, comme l’a exprimé le ministre de la Défense Moshe Ya’alon, qui a déclaré qu’il préférait « la présence de Daech aux frontières d’Israël plutôt que celle de l’Iran et de ses alliés ». Israël a attaqué les avions, l’artillerie et les capacités de renseignements de la Syrie pour soutenir les djihadistes, en particulier dans le secteur de Quneitra où était déployée l’armée de Khaled bin Walid, qui avait prêté allégeance à Daech, ainsi que dans les zones favorables au Front al-Nosra – Al-Qaida à Daraa et dans d’autres régions du sud.
Mais Israël ne s’est pas contenté de ces attaques. Les avions israéliens ont continué à frapper au cœur de la Syrie à Damas, Homs, Hama et Al-Qaim, dans le désert de la Badia et partout où se trouvent des entrepôts militaires et des missiles que l’Iran a fournis à la Syrie afin de soutenir l’armée syrienne et de la réarmer avec des missiles de précision.
Israël a réussi à frapper et à détruire un grand nombre de ces entrepôts. Ce qui a incité l’Iran à modifier sa politique de stockage d’armement pour l’armée syrienne. La Syrie a construit des entrepôts stratégiques dans les montagnes et sous terre dans des silos, en attendant le moment opportun pour imposer un équilibre de la dissuasion, en réponse aux centaines de raids israéliens, mais ce moment n’est pas encore venu. La priorité syrienne reste toujours la libération de ses territoires encore occupés, principalement à Afrin, Idlib et ses environs, sans oublier les champs pétrolifères et gaziers qu’occupent les USA dans le nord-est de la Syrie.
À Idlib et dans sa région rurale, l’armée turque a établi de grandes bases militaires. Des éléments des groupes Hayat Tahrir al-Cham (l’ancien Front al-Nosra) et Ansar al-Din (al-Qaeda et ce qui reste de Daech) circulent toujours dans et autour des bases militaires que les Turcs ont établies (à Idlib et dans sa campagne environnante).
L’Iran ne veut plus tolérer que ses entrepôts continuent de subir des frappes israéliennes sans riposte. Les conseillers iraniens (ils sont quelques centaines) ne sont pas autorisés à répondre à ces attaques, parce que cette décision appartient au président syrien Bachar al-Assad. Lui et ses alliés sont conscients que toute réponse iranienne à partir de la Syrie entraînerait fort probablement les USA dans la bataille pour soutenir son allié Israël, ce qui pourrait influencer les prochaines élections présidentielles aux USA en faveur de Trump. Ce dernier, qui est aux prises avec d’innombrables problèmes dans sa gestion des affaires étrangères et intérieures, est loin d’être assuré de reprendre sa place à la Maison-Blanche pour un nouveau mandat de quatre ans.
C’est ce qui a amené l’Iran à prendre la décision, selon des sources privées, d’évacuer les lieux où se rassemblent ses conseillers, non pas en vue d’un retrait ou d’un redéploiement, mais plutôt pour établir leurs bases dans des casernes de l’armée syrienne. C’est le Hezbollah qui a repris les bâtiments iraniens devenus vacants. La Russie a été informée de ce changement pour que l’information parvienne à Israël, qui se coordonne avec Moscou et sa base en Syrie (base de l’aéroport militaire de Hmeimim, au nord-ouest de la Syrie) chaque fois que Tel-Aviv lance ses avions en direction de la Syrie pour frapper des cibles. Israël et la Russie ont convenu que Moscou et Hmeimim seraient informés des détails de toute frappe quelques heures avant qu’elle n’ait lieu afin d’éviter les accidents, surtout depuis que la Russie a accusé Israël de s’être mis délibérément à l’abri derrière des avions russes pour tromper les défenses aériennes syriennes, lorsque son Ilyushin-20 a été abattu en septembre 2018, qui a coûté la vie à 15 officiers russes. La Russie informe ensuite l’armée syrienne et ses alliés des prochaines frappes israéliennes. Moscou refuse d’être impliqué dans le conflit Iran-Syrie-Israël. La Russie a des intérêts stratégiques avec tous les belligérants et ne fait pas partie de l’Axe de la Résistance.
La Russie a donc informé les dirigeants israéliens de l’initiative des conseillers iraniens et de leur présence parmi les unités de l’armée syrienne. La Russie a averti Israël de ne frapper l’armée syrienne sous aucun prétexte et l’a informé que les bases iraniennes ont été confiées au Hezbollah.
Il paraît évident que le Hezbollah veut dégager la Syrie et l’Iran de la responsabilité d’une riposte. Israël est conscient que toute attaque contre des membres du Hezbollah au Liban ou en Syrie entraînerait une riposte directe le long des frontières libanaises et à l’intérieur de la Palestine. Israël doit donc réfléchir sérieusement avant de bombarder tout objectif du Hezbollah, car des représailles ne manqueront pas de suivre, tout en empêchant une riposte américano-israélienne contre la Syrie. Le Hezbollah devient ainsi une nouvelle « règle d’engagement » en Syrie qui paralyse la liberté d’Israël de violer la souveraineté syrienne.
Avant toute frappe aérienne visant des cibles précises en Syrie, les drones israéliens s’assurent qu’il n’y a pas de conseillers iraniens sur les lieux et que l’avertissement russe est parvenu aux personnes concernées pour permettre l’évacuation du personnel et réduire les pertes humaines. Israël procède de la même façon lorsqu’il s’en prend à des voitures ou des camions du Hezbollah, en avertissant les conducteurs et les passagers. Israël tire un missile (deux la dernière fois) devant le véhicule, afin que les passagers comprennent qu’ils doivent sortir et prendre leur distance pour permettre à Israël de bombarder en toute sécurité. Lorsque cela se produit, une réponse dissuasive du Hezbollah n’est pas nécessairement requise ou dure, puisqu’il n’y a eu que des pertes matérielles.
Le ministre israélien Naftali Bennett a déclaré que lorsqu’Israël frappe un camion, il en laisse passer cinq autres. Israël veut éviter d’être à nouveau mis dans l’embarras par le Hezbollah comme lorsqu’il a tenté d’envoyer des drones suicide en banlieue de Beyrouth l’an dernier. Il est donc probable que les frappes israéliennes sur la Syrie diminueront en nombre ou qu’Israël se fiera à ses renseignements de sécurité avant de frapper une cible du Hezbollah, afin de s’assurer qu’elle est exempte de toute présence humaine et éviter des pertes et une nouvelle humiliation comme celle imposée à l’armée israélienne au cours des derniers mois à la frontière libano-palestinienne.
Israël marche sur un champ de mines stratégique. Le danger pour Israël réside dans toute erreur possible qui pourrait tuer des membres du Hezbollah en Syrie. Pareil résultat conduirait à une escalade qui pourrait entraîner la région du Moyen-Orient dans une guerre totale plus étendue. Ce ne serait pas non plus à l’avantage d’Israël et de son allié Donald Trump. Sa présidence est déjà embourbée dans des crises à l’étranger avec la Russie, la Chine, l’Iran, le Venezuela, ainsi que sur le plan intérieur en raison de la mauvaise gestion de la pandémie de coronavirus, auxquelles s’ajoutent les conséquences des émeutes récentes et des troubles raciaux ayant suivi le meurtre d’un Noir américain par la police, et les cinquante millions d’emplois perdus aux USA.
Les nouvelles règles d’engagement du Hezbollah, son armement perfectionné et son expérience militaire exceptionnelle ont un effet dissuasif important. Mais il suffit parfois d’une erreur pour déclencher une guerre. Israël va-t-il commettre une erreur aussi fatale?
Par Elijah J. Magnier
Traduction : Daniel G.
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Source: Elijah J. Magnier
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En 2011, une importante coalition arabo-occidentale s’est formée et a investi d’énormes ressources financières, médiatiques et militaires pour tenter de renverser le président syrien Bachar al-Assad. À cette fin, l’alliance avait créé des centres d’opérations militaires où les services du renseignement américains, britanniques, turcs et arabes dans le nord de la Syrie, en Jordanie et en Turquie s’activaient à préparer l’ère post-Assad. En 2003, le président Assad avait déjà refusé toute concession au secrétaire d’État américain Colin Powell qui lui avait rendu visite après l’occupation de l’Irak. Deux ans après le début de la guerre dans son pays, le président syrien a demandé l’aide de ses alliés en Iran et au Liban (puis à la Russie plus tard), pour qu’ils puissent préserver leurs intérêts, leurs objectifs stratégiques et leurs obligations avec leur partenaire syrien. L’intervention militaire russe a eu lieu en septembre 2015 et était attribuable à plusieurs facteurs : les forces iraniennes et alliées dominaient sur le terrain, mais l’intervention des troupes de Moscou était nécessaire pour dominer l’espace aérien syrien. C’est d’ailleurs ce qui a fait basculer la coalition arabo-internationale. La situation a-t-elle changé aujourd’hui pour le président Assad, maintenant que la plupart des régions de la Syrie ont été libérées? Puis que veut la Russie : le contrôle du Levant et le retrait d’Assad?
Le président Hafez al-Assad et son fils Bachar n’ont jamais voulu concéder les hauteurs du Golan et ont refusé de se réconcilier avec Israël : il n’était pas question de renoncer à une portion du territoire syrien en échange d’un accord de paix. Bien des années plus tard, soit en 2003, 2008 et même 2018, le président Bachar al-Assad a refusé de livrer la tête dirigeante du Hamas et du « Hezbollah » à la demande des USA. Pendant la guerre syrienne, les Émirats arabes unis ont servi de médiateur pour qu’une délégation américaine puisse se rendre à Damas et proposer de mettre fin à la guerre et de reconstruire ce qui avait été détruit en Syrie en échange de l’expulsion du Hezbollah, de l’Iran et de la Russie du Levant.
Au début de la guerre syrienne en 2011, la Russie n’était pas prête à sortir de l’hibernation qu’elle s’était elle-même imposée et maintenait en veilleuse son rôle au Moyen-Orient et sur la scène internationale. La même année, le président russe de l’époque, Dmitri Medvedev, a laissé l’OTAN détruire la Libye. Mais en 2015, sous la présidence de Vladimir Poutine, l’étau se resserrait sur les alliés syriens de la Russie dans les vastes campagnes de la Syrie, où se déployaient des dizaines de milliers de djihadistes et militants financés et entraînés par des dizaines de pays occidentaux et arabes. Le major général iranien Qassem Soleimani s’est alors rendu à Moscou et a réussi à persuader le président Poutine d’envoyer ses avions au Levant pour défendre les intérêts de la Russie (base navale de Tartous que les djihadistes menaçaient de prendre) et de son allié syrien.
À partir de là, les médias occidentaux et arabes n’ont jamais cessé de se moquer des capacités militaires de la Russie. Les groupes de réflexion occidentaux souhaitaient l’échec de la Russie et prédisaient son enlisement dans le bourbier syrien. Lorsque la Russie a prouvé sa redoutable supériorité aérienne (l’Iran s’était engagé à rassembler les forces terrestres qui progresseraient dans la foulée des frappes aériennes russes), des analystes insouciants ont affirmé, traduisant ainsi les intentions, la stratégie et les vœux pieux des USA, que la Russie voulait destituer le président Assad et imposer le successeur qui lui plairait, parce que Moscou était devenu la force dominante au Levant.
Lorsque cette théorie a fait long feu, une autre hypothèse naïve a été proposée, à savoir qu’il existe un accord américano-russe en Syrie pour remplacer ou marginaliser le président Assad. Naturellement, les mêmes qui ont passé neuf ans à vouloir, promouvoir et prévoir la chute du président al-Assad et du gouvernement de Damas chaque mois, année après année, continuent de se bercer dans leur douce illusion. Ils ignorent ce qu’a dit l’ancien premier ministre qatari Hamad bin Jassem lorsqu’il a courageusement admis sa défaite : « La [proie] a échappé au piège qui lui était tendu et le temps est venu de reconnaître la réalité de notre défaite ».
Des sources influentes au sein de l’Axe de la Résistance en Syrie signalent qu’« il n’y a pas d’accord entre la Russie et les USA, mais une remise en question claire de l’influence de Washington au Moyen-Orient ». La Russie harcèle les avions américains, en s’approchant d’eux à une distance critique. La Russie voudrait qu’Assad approuve l’agrandissement de l’aéroport de Hmeimim et de sa base navale de Tartous, ainsi que la création d’autres bases statiques au nord de la Syrie. La Russie a statué que le Moyen-Orient fait partie de ses intérêts stratégiques pour affronter les forces US basées au Moyen-Orient et en Europe. La Russie ne pourra survivre au Levant que si elle établit une relation stratégique avec le président Assad, l’Iran et ses alliés. Les alliés de l’Iran saisissent toutes les occasions qu’ils peuvent de défier l’autorité des USA dans la région du Moyen-Orient, ce qui cadre parfaitement avec les objectifs de la Russie. »
Depuis que la Russie a décidé d’entrer dans l’arène syrienne, ses dirigeants veulent éviter qu’elle sombre dans le bourbier moyen-oriental. Elle se fie donc à l’Iran et à ses alliés pour rétablir le pouvoir du président Assad sur tous les territoires syriens occupés. La Russie n’a aucunement l’intention de susciter l’hostilité des djihadistes sunnites ou de s’opposer aux chiites et aux alaouites dans une guerre d’usure imprévisible. Si cela se produisait, la Russie se retrouverait aux prises avec une nouvelle guerre afghane comme en 1981, un « objectif » contraire au plan de Poutine de s’établir au Moyen-Orient. Il est essentiel d’ajouter que la Russie ne contrôle pas le territoire et n’a pas besoin d’une armée pour s’étendre, protéger ou même lancer une nouvelle guerre coûteuse, après avoir vu les capacités avérées de la Syrie et de ses alliés sur le champ de bataille pendant toutes ces années du conflit syrien.
« La Russie a promis de moderniser la flotte aérienne syrienne et la capacité des missiles défensifs-offensifs de l’armée syrienne. Moscou investira aussi dans la reconstruction d’une partie des projets d’infrastructure syriens, principalement dans le domaine de l’énergie. En échange, la Russie augmentera sa capacité de combat contre les USA et l’OTAN. Le président syrien échange avec le président russe comme s’il s’agissait d’un allié stratégique, même si certains alliés de la Russie, notamment Israël, sont les ennemis de la Syrie. La Russie a décidé de coopérer avec plusieurs pays du Moyen-Orient, ce qui signifie qu’elle veut pouvoir compter sur des alliés forts en Syrie, au Liban et en Irak. Cet objectif ne pourra se réaliser que grâce à ses relations avec le président Assad et avec les dirigeants iraniens, qui occupent une position forte et influente dans leurs pays respectifs », a expliqué la source.
Le président Poutine a chargé les ministères des Affaires étrangères et de la Défense de négocier l’augmentation de la présence militaire et le déploiement dans d’autres bases avec l’État syrien, car la Russie n’a nullement l’intention de quitter le Moyen-Orient. L’ère de l’unilatéralisme américain est révolue et la nouvelle position de force de la Russie en Syrie et en Libye crée un fossé dans la zone d’influence de l’OTAN. La Russie a cessé d’être passive et se positionne en vue d’un affrontement. Ainsi, l’expansion du positionnement stratégique russe n’a pas grand-chose à voir avec le maintien du président Bachar al-Assad au pouvoir. Assad a d’ailleurs décidé d’organiser les prochaines élections présidentielles en dépit de la tentative internationale, Nations unies y compris, d’empêcher le retour et le vote des réfugiés syriens se trouvant dans les pays voisins.
La Russie estime que les USA sont aujourd’hui en état de faiblesse. Elle devrait donc tirer avantage des troubles internes du président Donald Trump et du défi qui l’attend dans les prochains mois, à l’approche des élections présidentielles aux USA. La Russie voudrait profiter de cette occasion pour progresser sur le front du Moyen-Orient et ainsi se tailler une position solide dans les eaux chaudes de la Méditerranée.
Le président Trump est en difficulté sur le plan intérieur en raison de la mauvaise gestion de la pandémie de coronavirus et du grand nombre d’Américains qui se retrouvent sans emploi. En outre, depuis plus d’une semaine, son pouvoir est sérieusement remis en cause en raison de son attitude provocante vis-à-vis la discrimination raciale favorisée par l’État. Ses relations avec la Chine et la Russie sont en crise. Il a dû gober les hameçons que lui a lancés l’Iran en bombardant la plus grande base américaine en Irak, mais aussi en violant les sanctions que les USA imposent au Venezuela lorsqu’il a envoyé cinq pétroliers et des pièces de rechange pour réparer ses raffineries. Le président des USA fait preuve d’une grande faiblesse sur plusieurs fronts et a réussi à rallier l’ours russe et le dragon chinois contre lui. Une nouvelle alliance stratégique solide, qui n’est pas une alliance aveugle, entre la Russie, la Chine, l’Iran, la Syrie et ses alliés au Moyen-Orient se met en place et remet en cause l’hégémonie des USA.
Le président Poutine a nommé un envoyé spécial pour servir d’intermédiaire entre lui et le président Bachar al-Assad, afin d’éviter toute équivoque entre les messages, les accords et les décisions rapides qui doivent être prises, et de lever tout obstacle le plus rapidement possible. C’est une nouvelle ère de partenariat entre alliés qui commence, ce qui change de l’ère de domination et d’intimidation à laquelle les USA nous ont habitués Moyen-Orient. Cette nouvelle ère crée un équilibre au Moyen-Orient qui fait défaut depuis des décennies.
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