« L’image de Julian Assange traîné hors de l’ambassade de l’Équateur à Londres est un emblème de notre époque. La force contre le droit. La brutalité contre la loi. L’indécence contre le courage. Six policiers malmenant un journaliste malade, ses yeux plissés face à sa première lumière naturelle depuis près de sept ans. Le fait que cet outrage se soit produit au cœur de Londres, au pays de la Magna Carta, devrait faire honte et susciter la colère de tous ceux qui se soucient pour les sociétés « démocratiques ». Assange est un réfugié politique protégé par le droit international, bénéficiaire de l’asile en vertu d’un pacte strict dont la Grande-Bretagne est signataire. Les Nations unies l’ont clairement indiqué dans la décision juridique de leur Groupe de travail sur la détention arbitraire ». [John Pilger, 12 avril 2019]
Il est grand temps mes amis
De réaliser
Que la persécution
De Julian est la nôtreQu’il est notre frère
D’arme et de parole
Et l’un des éclaireurs
Des crimes de ce temps
Commis en notre nom…Prisonnier d’opinion
Au cœur dévoyé
De nos démocraties
Qui montrent par son supplice
Ce qu’elles sont sous leur masque…Sa persécution
Est une attaque frontale
Portée à la racine
De nos régimes
Et de nos droits :Notre droit à penser
A réfléchir
A nous informer
A échanger, partager
Et à construire ensemble
De nos mains, de nos cœurs
Et de nos esprits libres
Le monde dans lequel
Nous voulons vivre et aimer…Je dis le monde dans lequel
Nous voulons vivreEt pas seulement rêver et passer…
Qu’est-ce qu’il a défendu ?
O presque rien !La liberté d’expression
D’information d’une presse
Qui est encore
Libre et indépendante…Le droit des citoyens
A la vérité
Notre devoir de savoir
Ce que les gouvernants
Que nous élisons
Font en notre nomSurtout lorsque dans l’ombre
Dont ils ont tant besoin
Ils commettent leurs crimes…Le droit des journalistes
Celui de tout chercheur
D’enquêter librement
Sur toute question
D’intérêt public
Et de protéger
Soigneusement leurs sources…Le droit des lanceurs d’alerte
De divulguer des faits
Qui heurtent leur conscience
Sans peur de représailles
Et le devoir de les protéger
Par le droit, la justice
S’ils sont attaqués…La protection
De notre vie privée
Indispensable à l’éclosion
De notre être humain…Le droit à un procès
Juste et équitable
Et à ne pas être privé
De sa liberté
Arbitrairement…Le droit de ne pas être
Soumis au supplice
Pour avoir agi
En son âme et conscience…Et le droit au respect
Et à la protection
Par le droit, la justice
Pour avoir osé dire
La vérité…N’est-ce pas ce que nous
« Aux droits de l’homme »
Des Nations sans amour
Faisons tous les jours ?Documenter les crimes
Des Etats et des autres
Exposer leurs mensonges
Promouvoir la justice ?N’est-ce pas la vocation
De cette institution
Et la raison d’être
De notre engagement
Pour un peu plus d’être
Et monde moins sombre ?A travers la persécution
De Julian Assange
Ce sont nos libertés
Qui sont menacées
Les fondements mêmes
De cette démocratie
Qui reste le moins pire
Espace de libertéMalgré ses souillures
Ses perversions, ses vices
Et ses caricatures
Ses crimes innombrables
Epouvantables
Commis en notre nom…Combien de pays
Ont été dévastés
De peuples martyrisés
Depuis trop de siècles
Par ce monde chrétien
Qui se prétend libre ?Ce sont ces fondements
Moraux de notre vie
Qui sont visés au nom
De la raison d’Etat
De la sécurité nationale
Désormais en sursis
Pour combien de temps encore ?Il est minuit moins le quart…
Par solidarité
Avec celui qui paye
De sa vie, de sa liberté
Depuis dix ans déjà
Le crime d’avoir dit
Quelques vérités crues
Et d’avoir mis à nu
Certains de nos pouvoirsNous avons le devoir
De nous opposer
A son extradition
Qui signera, honteusement
Sa sentence de mort
Dans les caveaux du droit
De qui est le plus fort…Les voyous qui le réclament
De procédure en procédure
Au nom d’une justice
Qui n’est pas la nôtre
Le garderont à vue
Le reste de sa vie…S’il ne meurt pas avant
D’épuisement
Et de désespoir
Pour avoir trop cru
A la lumière
Au pouvoir du droit
De la vérité
Et de la justice
Que nos institutions
Sont censées protéger…S’il ne met pas lui-même
Fin à cette non-vie
Qu’est devenue la sienne
Ayant perdu espoir
De revoir le soleil
Et le bonheur de vivre
Enfin avec les siens…Il est fort à craindre
Qu’il soit aussi
Retrouvé un matin
Sans vie dans sa cellule
« Suicidé » comme d’autres
Devenus trop embarrassants…Ceux qui le réclament
Pour avoir mis à nu
Certains de leurs secrets
N’ont pas intérêt
A ce que son procès
Ouvre la boite
A Pandore de leurs crimes…N’ajoutons pas à son supplice
Le poids de notre indifférence…Il sera vain ensuite
De pleurer sur ses pas
De demander pardon
De ne pas lui avoir
Tendu la main à temps…Julian n’a nul besoin
De larmes de crocodiles…Ce dont il a besoin
C’est de notre fraternité
De notre solidarité
Consciente et active
Et désormais urgente
Chaque minute compteIl est déjà
Minuit moins le quart…
Ce poème vous invite
A vous joindre en chœur
A cette supplique
Adressée aux iniques
Qui tiennent en leurs serres
La vie de Julian
Pour exiger sa liberté
Et à travers la sienne
Défendre la nôtre…Cela nous le devons
Non seulement à Julian
Mais aussi à ces valeurs
Précieuses, universelles
Auxquelles nous croyons
Et sommes attachés
Et qui donnent sens
Et beauté à nos vies…
(Avril 2022)
Ancien haut fonctionnaire du Bureau du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme
Source: Arretsurinfo.ch – Traduit de l’anglais par l’auteur







































































































































































































































