McGénocide
CNN affirme qu’un soldat israélien est traumatisé
d’avoir dû écraser trop de Palestiniens
avec son bulldozer blindé D9.
Il dit qu’il ne peut plus manger de viande
à force d’avoir dû rouler sur tant de chair humaine
(il dit même “viande”)
que ça lui rappelle tout le sang et les tripes,
les os et les chairs qui jaillissaient
lorsqu’il les écrasait.
Le pauvre petit soldat de l’armée israélienne
ne peut même plus savourer un Big Mac,
ni mordre dans un gros hamburger juteux de McGenocide,
ni mastiquer une bouchée de sang
sans être hanté par des visions
de torses et de crânes humains débordant de tripes et de cervelle
qu’il écrasait “morts et vifs”
dans le chaos de Gaza.
Il ne peut plus savourer ses McNuggets pour enfants
sans que surgisse le souvenir de tous ces enfants assassinés,
tous les petits corps,
les corps déchiquetés,
les corps broyés au bulldozer,
les morceaux de corps compressés dans les chaînes du bulldozer,
coincés dans les rouages du bulldozer,
les extraire à la main parce que, bordel,
il faudra encore s’en servir demain.
Et le journaliste de CNN dit
Comme c’est triste ! Si triste !
Un homme a droit à sa viande.
Mordre dedans,
la sentir couler sur le menton,
l’entendre appeler et supplier à l’aide,
l’entendre appeler sa mère une dernière fois
et puis plus rien que des claquements et craquements
mastiquer et avaler
et se rincer à l’alcool fort
pour chasser de son cœur toute émotion,
ces sensations à jamais indélébiles,
qui cognent comme un feu de mortier quand il s’éveille de ses rêves rouges
de cris, de giclées, de craquements et d’explosions,
et qu’il se rappelle son enfance innocente
comme les petits fantômes rouges qui hantent ses nuits.
Et nous aussi, on vit le McGenocide, n’est-ce pas ?
Nous le vivons tout comme lui, ici, dans ce pays de fous
où nous rions et plaisantons et mangeons des seaux de viande bouchère
quand nos gouvernements font des humains de Gaza de la chair à canon
Le Soleil du trou noir grimace, la viande dégouline sur nos mentons
tandis que le ciel devient rouge et les oiseaux des drones Faucheurs,
nous ricanons sur nos podcasts et râlons sur Uber Eats
pour cinq minutes de retard de notre prochaine assiettée de carnage.
Et nous aussi, faisons des cauchemars, n’est-ce pas ?
Nous nous réveillons en tremblant de terreur,
pour ce que nous rendons possible,
ce à quoi nous consentons tacitement pendant que nous nous distrayons
avec nos smartphones et services de streaming, porno et ragots
et les grotesques élections bidons du prochain président bidon de l’Amérique
avec des assiettes de viande rouge saignante.
Nos dents s’aiguisent et nos cœurs se font durs,
et les cheminées dégagent une horrible puanteur dans l’air.
Dans cette cité génocidaire,
cette ville fantôme,
cette ville de boucherie,
il faut savoir étouffer les sens…
aboyer et braire à la lune rouge sang jusqu’à l’aube
car c’est l’enfer du sommeil
du rêve
du souvenir,
le souvenir de ce que nous avons fait,
de là où nous allons,
de ce que nous sommes devenus,
et ce que nous serons encore.
Caitlin Johnstone, 23 octobre 2024
Source: Caitlin Johnstone,