
Force intérimaire des Nations Unies au Liban, FINUL, casque bleu sur la « Ligne bleue » qui délimite la frontière entre le Liban et Israël en 2009. (Photo ONU/Eskinder Debebe)
Sans un gouvernement américain prêt à les arrêter, les Israéliens avancent sur la pointe des pieds vers ce qui sera une destruction sans précédent infligée à leur encontre.
Alors que la phase actuelle de la guerre entre le Liban et Israël a commencé par une série de victoires tactiques israéliennes, il est clair que le vent a tourné et que l’initiative est du côté du Hezbollah. Les récentes frappes sur le centre de Tel-Aviv ont démontré que si ce conflit continue à s’intensifier, le prix à payer sera lourd pour l’entité colonisatrice.
Bien que les attaques israéliennes sur les bipeurs et la série d’assassinats contre les hauts dirigeants du Hezbollah à la mi-septembre aient permis à l’entité sioniste de remporter une série de victoires tactiques, il apparaît aujourd’hui qu’elle a surjoué son jeu.
Bercé dans un faux état de confort, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a non seulement ouvert un nouveau front dans sa guerre contre Gaza, mais il l’a fait en vidant son cabinet de toute voix dissidente. Ce qui semblait être la première grande avancée d’Israël dans la guerre en cours, lui redonnant une image de puissance en septembre, a été rapidement ruiné le 1er octobre, avec l’attaque de missiles balistiques de l’Iran qui a brisé l’idée de la domination régionale israélienne et repris l’initiative stratégique pour l’Axe de la résistance.
Jusqu’à ce que le Premier ministre israélien décide de transformer le front libanais en guerre ouverte, il n’était resté qu’un front de soutien visant à faire pression sur Israël et ses soutiens américains pour obtenir un cessez-le-feu mettant fin au massacre dans la bande de Gaza. Cependant, les Israéliens n’ont pas pu s’en empêcher et ont décidé de faire monter les enchères au niveau régional, forçant les forces de résistance régionales à l’escalade.
Soudain, tout ce qui avait été réalisé par les Israéliens au cours des deux semaines précédentes a été réduit à néant et ils ont décidé d’entrer au Sud-Liban par voie terrestre. Malgré les coups portés au Hezbollah, la résistance a prouvé sa capacité à sortir d’une attaque de décapitation contre la majorité de ses hauts dirigeants et, plus d’un mois plus tard, elle a pris l’initiative dans la guerre en cours.
L’invasion terrestre israélienne n’a rien donné de valable sur le plan militaire, ne parvenant même pas à sécuriser les villages sous son contrôle et ne réussissant qu’à faire exploser les infrastructures civiles, la situation permettant à ses troupes de voler les sous-vêtements des femmes afin de pouvoir réaliser des vidéos perverses sur les réseaux sociaux. Les affirmations selon lesquelles le Hezbollah aurait été vaincu, chassé du sud du Liban et aurait même éliminé jusqu’à 80 % de ses réserves d’armes sont toutes contredites par les événements que nous voyons se dérouler sur le terrain.
Alors que les objectifs initiaux de Netanyahu et de sa coalition étaient le retour de quelque 100 000 colons dans leurs colonies du nord de la Palestine occupée, tout en s’efforçant de réduire la capacité du Hezbollah à les attaquer depuis le sud du fleuve Litani, ils déclarent aujourd’hui des victoires que même leur propre opinion publique, largement formatée, ne croit plus. Au lieu de renvoyer les colons dans le nord de la Palestine, c’est tout le contraire qui s’est produit, les colonies s’étant transformées en zones militaires interdites, et la portée des tirs du Hezbollah s’étant accrue pour englober Tel-Aviv et au-delà. Haïfa est devenue l’objet de bombardements quotidiens à la roquette, tandis que des drones suicides parcourent librement le ciel pour atteindre leurs cibles militaires avec précision.
Malgré la puissance évidente des capacités du Hezbollah en matière de roquettes, de missiles et de drones, il est important de noter que l’utilisation de ces armes a été principalement réservée à des cibles militaires israéliennes situées en dehors des zones peuplées.
C’est ce qui s’est passé face aux attaques israéliennes menées sans discernement sur l’ensemble du territoire libanais et au ciblage direct des civils à l’intérieur de leurs maisons, ainsi que des travailleurs médicaux, des soldats de l’armée libanaise, des forces de la FINUL, des journalistes et des équipes d’intervention d’urgence.
Les Israéliens n’ont donc plus beaucoup d’options. Il semble qu’ils aient déjà joué leurs plus grosses cartes au Liban, sans réussir à mettre en œuvre une stratégie de frappe et de relance qui aurait pu modifier la perception qu’a l’opinion publique de leurs efforts de guerre. Il est clair que la guerre terrestre est sans issue et que plus ils s’engagent dans l’offensive, plus les pertes en soldats seront élevées.
En outre, ils emploient actuellement une stratégie similaire à celle adoptée en 2014 pour l’assaut de la bande de Gaza, mais ils se sont abstenus de lancer une attaque génocidaire totale sur le territoire libanais. Bien que l’ampleur des bombardements au Liban soit impressionnante et qu’ils visent manifestement des civils, les Israéliens n’ont pas cherché à mettre la nation à genoux.
La campagne de bombardement actuelle de l’armée israélienne est conçue pour fonctionner en cas de guerre limitée, mais il n’y a pas de fin en vue dans l’état actuel des choses. De plus, le rythme et la qualité de la campagne de missiles, de roquettes et de drones du Hezbollah ne cessent de s’intensifier. Cette situation n’est pas seulement préoccupante pour les dirigeants sionistes, elle les contraint aussi de faire diversion, ou trouver une solution.
Israël a donc le choix entre quatre options potentielles : lancer une attaque qui ouvre potentiellement une troisième guerre, perpétrer un génocide au Liban, trouver une diversion pour gagner du temps, ou accepter une cessation des hostilités.
Tous les indicateurs suggèrent que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu élimine délibérément toute voix opposée au sein de son propre cabinet, après avoir déjà dissous le « cabinet de guerre » et écarté des postes de décision des personnalités telles que Benny Gantz, Gadi Eisenkot et Yoav Gallant. Netanyahou cherche à assurer sa survie politique, qui est menacée par la fin de la guerre. Quant à un coup d’éclat pour gagner du temps, il s’agit d’une solution temporaire qui peut facilement être annulée.
La première option consiste à étendre la guerre plus encore, en lançant une invasion terrestre dans le sud de la Syrie, tout en mettant les Israéliens encore plus en danger, dans un environnement totalement imprévisible. Quant à la tentative d’entraîner les États-Unis dans une guerre contre l’Iran, elle pourrait avoir des conséquences encore plus catastrophiques.
La dernière option que les Israéliens pourraient tenter de mettre en œuvre serait un massacre à l’intérieur du Liban, dont les conséquences seraient indiscutablement catastrophiques. Cependant, le Hezbollah a démontré qu’en utilisant une poignée de missiles même pas de dernière génération, il peut frapper le centre de Tel Aviv sans problème. Si le régime sioniste décide de changer de tactique et de tenter de faire du Liban un véritable Gaza, le niveau de destruction qu’il subira pourrait dépasser ses prévisions.
Quelle que soit la façon dont on envisage la situation, les Israéliens ne feront que subir des coups de plus en plus rudes à mesure qu’ils poursuivent l’escalade. En l’absence d’un gouvernement américain disposé à les arrêter, ils avancent sur la pointe des pieds vers ce qui va se traduire par un niveau de destruction sans précédent, dont l’ampleur ne fera que pousser une part encore plus grande de leur population à fuir vers tout autre pays pour lequel ils détiennent un passeport.
Source : Al-Mayadeen, 21 novembre 2024
Traduction ASI