Muhammad vend des livres scolaires devant la tente de sa famille. © Abubaker Abed

Des milliers d’enfants ont été assassinés depuis le début de la guerre génocidaire d’Israël contre Gaza. Beaucoup d’autres ont été blessés.

Les effets tant physiques que psychologiques de la violence sont lourds de conséquences. Les enfants ont subi les déplacements, une famine programmée et la terreur causée par les bombardements incessants.

Muhammad a 11 ans.

Lui et sa famille vivent désormais dans une tente. Elle s’est installée à Deir al-Balah, au centre de la bande de Gaza.

La famille a été contrainte de fuir le camp de réfugiés de Bureij, situé à proximité, il y a plusieurs mois. Leur maison a été attaquée, et Muhammad a été blessé à la tête et à un bras.

Comme toutes les pièces de la maison ont été envahies par la fumée, Muhammad a dû sauter par une fenêtre pour gagner un bâtiment adjacent. “Nous ne savons vraiment pas comment nous avons pu nous en sortir vivants”, a-t-il déclaré.

Dans un premier temps, la famille s’est réfugiée dans une école gérée par l’Agence des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA). Elle se trouvait près de leur maison.

Ils n’ont passé que neuf jours dans l’école, car les soldats israéliens ont tiré à plusieurs reprises sur le bâtiment depuis leurs blindés. L’armée israélienne a ensuite lancé une offensive militaire de grande envergure contre le camp.

Le père de Muhammad est tombé malade et ne travaille plus depuis le 7 octobre. Pour aider sa famille à survivre, Muhammad vend ses livres d’école et ceux de ses frères et sœurs. Muhammad a raconté le déroulement d’une journée tristement banale.

Il se lève à 7 heures, se lave le visage et passe un peu de temps au soleil. “Nous ne prenons pas de petit-déjeuner parce que nous n’en avons pas les moyens”, explique-t-il. Il aide ensuite sa mère à ranger la tente et à laver les vêtements. La famille a un accès très limité à l’eau.

Plus tard dans la journée, Muhammad empile des livres d’école à l’extérieur de la tente et essaie de les vendre. Il demande environ 30 cents par livre.

Après quelques heures, Muhammad arrive à gagner 5 dollars, avec lesquels il achète deux boîtes de thon, du pain et de la duqqa – un condiment mélangeant des noix, des herbes et des épices. “Nous ne mangeons qu’un repas par jour”, explique-t-il. “Parfois, nous n’avons même pas assez d’argent pour ça”.

Avant le coucher du soleil, Muhammad et ses frères et sœurs font voler des cerfs-volants, jouent à des jeux et se lisent des histoires.

Ils sont dix dans leur tente. Ils sont contraints de partager matelas et couvertures. Muhammad fait souvent des cauchemars. “Je rêve toujours que les soldats israéliens tuent ma famille”, dit-il.

Les choses ne s’arrangent pas au réveil, car Muhammad a peur d’être tué à tout moment. Il redoute aussi que des soldats israéliens “envahissent notre quartier, arrêtent et torturent des gens”.

“La plupart du temps, je suis terrifié”, a-t-il déclaré.

“Comment se fait-il que nous ayons à subir tout ça ?”, demande-t-il. “Nous ne sommes que des enfants.”

Muhammad a ajouté que “jouer au football avec mes copains de classe et aller à l’école tous les matins me manque tant”.

“J’espère que cette guerre va s’arrêter et que tout sera bientôt comme avant”, a-t-il confié. “Mon seul souhait est de vivre en paix, dans le calme, et de pouvoir retourner vivre avec ma famille, dans notre maison”.

Abubaker Abed –  7 juin 2024

Abubaker Abed est journaliste et traducteur au camp de réfugiés de Deir al-Balah.

Source: https://electronicintifada.net/content/i-am-terrified-most-time/46921