Daniel Larison


L’effondrement du régime de Bachar el-Assad est l’occasion pour les États-Unis de revoir leur politique syrienne en faillite. Les États-Unis auraient dû abandonner cette politique depuis des années, mais aujourd’hui il n’y a plus de prétextes pour poursuivre la punition collective du peuple syrien et la présence militaire américaine illégale sur le sol syrien. Le temps est venu d’alléger rapidement les sanctions et de procéder au retrait immédiat des forces américaines. Les États-Unis doivent enfin laisser la Syrie tranquille.

Les troupes américaines actuellement présentes en Syrie n’ont aucune raison valable d’y être. Les administrations successives ont maintenu des troupes en Syrie au nom de la lutte contre l’État islamique, mais il est clair depuis des années que leur véritable objectif non déclaré est de s’opposer à l’influence iranienne. L’Iran a retiré ses forces de Syrie avant le départ d’Assad, et il est peu probable qu’un nouveau gouvernement syrien les accueille à nouveau de sitôt. Washington ne peut plus invoquer le spectre de l’Iran pour justifier le maintien de centaines de soldats dans un pays où ils n’ont rien à faire.

Quelle que soit la forme que prendra le gouvernement syrien, il sera en droit d’exiger le départ de toutes les forces étrangères de son territoire. Les États-Unis ne doivent pas attendre qu’on leur dise de partir. Il serait bon de retirer rapidement les forces américaines du pays afin d’éviter tout risque de conflit ou d’affrontement accidentel. Une fois que les troupes américaines auront quitté la Syrie, il n’y aura plus de raison d’avoir une présence militaire américaine en Irak non plus.

Les États-Unis sont illégalement en guerre en Syrie depuis neuf ans. Le Congrès n’a jamais autorisé le recours à la force ou les déploiements en Syrie, et il n’existe aucun mandat international permettant aux forces américaines d’opérer dans ce pays. Les États-Unis violent de manière flagrante le droit international et bafouent la souveraineté syrienne depuis près d’une décennie. Cela doit cesser immédiatement.

Maintenant qu’Assad n’est plus au pouvoir, il n’y a plus aucune justification possible pour maintenir des sanctions punitives de grande ampleur. Ces sanctions ont toujours été destructrices et ont principalement porté préjudice à la population civile en étranglant l’économie et en empêchant la reconstruction. Les sanctions ont exacerbé la grave crise humanitaire du pays et entravé l’acheminement de l’aide. Les sanctions générales étaient une politique terrible lorsqu’Assad était encore au pouvoir, et elles sont totalement indéfendables maintenant qu’il n’est plus là. Le Congrès devrait abroger la législation existante sur les sanctions et la prochaine administration devrait lever ou suspendre autant de sanctions qu’elle le peut.

Les États-Unis ne doivent pas commettre la même erreur qu’en Afghanistan, lorsqu’ils ont pénalisé le peuple afghan par une guerre économique après l’effondrement du gouvernement client de Washington. La pire chose que les États-Unis puissent faire aujourd’hui est de retarder l’allègement des sanctions contre la Syrie ou d’essayer d’utiliser les sanctions comme levier pour tenter d’influencer l’orientation de la politique syrienne. C’est au peuple syrien de décider de l’avenir de la Syrie, et les États-Unis devraient se retirer.

Trump a fait savoir qu’il ne souhaitait pas que les États-Unis s’impliquent dans les affaires syriennes à l’avenir. C’est une bonne nouvelle si elle se vérifie. La dernière fois que M. Trump a indiqué qu’il souhaitait retirer les forces américaines de Syrie, il s’est heurté à une forte résistance au sein de sa propre administration et de l’armée, et il a fini par laisser une présence militaire dans le pays. Cette fois-ci, rien ne devrait empêcher un retrait complet. Il ne peut être présenté comme une concession à Assad, puisqu’il n’est plus là. Il ne peut être présenté comme un cadeau à l’Iran, puisque l’Iran s’est déjà retiré du pays.

La guerre en Syrie a prouvé sans l’ombre d’un doute que l’intervention extérieure intensifie et prolonge les conflits. Sans l’ingérence interminable et destructrice des États-Unis, des États européens, de la Russie, de la Turquie, des États du Golfe et d’Israël, la guerre en Syrie aurait pu se terminer bien plus tôt et faire beaucoup moins de victimes. Le peuple syrien a dû souffrir des ambitions désastreuses de ces puissances extérieures. Si les voisins de la Syrie et les autres puissances avaient respecté la souveraineté de la Syrie, la Syrie et la région au sens large auraient peut-être subi beaucoup moins de violences et de bouleversements.

Les États-Unis devraient être prêts à participer aux efforts d’aide humanitaire lorsqu’on le leur demande, mais pour le reste, la Syrie a reçu suffisamment d’« aide » de la part de Washington pour toute une vie. Les États-Unis devraient agir rapidement pour lever tous les obstacles aux investissements étrangers et à la reconstruction qu’ils ont mis en place. Ils devraient ensuite se tenir à l’écart d’un pays qu’ils ont tant contribué à dévaster.

Daniel Larison, 11 Décembre 2024

Daniel Larison est chroniqueur pour Responsible Statecraft. Il est rédacteur en chef adjoint d’Antiwar.com et ancien rédacteur en chef du magazine The American Conservative. Il est titulaire d’un doctorat en histoire de l’université de Chicago. Suivez-le sur Twitter @DanielLarison et sur son blog, Eunomia.

Source:https://original.antiwar.com/daniel_larison/2024/12/10/leave-syria-alone/

Traduit par Arretsurinfo.ch